7/10Faites entrer l'accusé

/ Critique - écrit par Filipe, le 25/08/2005
Notre verdict : 7/10 - Elémentaire ! (Fiche technique)

Tags : entrer faites emission france affaire jean saison

Depuis cinq ans, France 2 diffuse une émission appelée Faites entrer l'accusé qui, chaque dimanche en deuxième partie de soirée, consacre un reportage d'une heure et demie à une grande affaire judiciaire. Produite par Christian Guérin, réalisée par Bernard Faroux et présentée par Christophe Hondelatte, elle a su profiter de la récente envolée du journalisme d'investigation télévisé et peut à ce jour être considérée comme un modèle du genre, et ce quel que soit le point de vue que l'on adopte.

Il est évident que la qualité de ce type d'émission se mesure avant tout au poids de sa documentation : rapports d'enquête, comptes-rendus d'audience, anciens reportages télévisés, coupures de presse, photographies, vidéos amateurs... Tout y est savamment observé, analysé, décortiqué, évalué. Et puis, la présentation de tous ces éléments d'enquête est ponctuée d'interventions du présentateur, qui évoque certains faits précis, apporte d'éventuelles précisions quant au déroulement chronologique de certains événements, restitue l'état des connaissances des enquêteurs à un instant "t", reçoit les principaux acteurs de l'affaire (proches des victimes, témoins, journalistes, enquêteurs...) sur le plateau de son émission ou sillonne les rues en quête d'éventuels témoignages inédits. Ces coupures permettent de privilégier certains aspects d'une affaire plutôt que d'autres, les choix opérés se révélant souvent justifiés. Ainsi, chaque numéro de Faites entrer l'accusé est l'occasion de pratiquer l'autopsie d'une ou de plusieurs erreurs judiciaires (ayant conduit des innocents en prison, des témoins au suicide...) ou de mettre en exergue l'influence parfois jugée néfaste des médias, en particulier lorsque ces derniers se substituent aux enquêteurs et condamnent par avance de simples suspects.

Faites entrer l'accusé n'échappe cependant pas à la sacro-sainte règle (généralement attribuée à Christine Ockrent) selon laquelle "sur les chaînes nationales, le fait divers l'emporte parce que l'émotion prime sur l'analyse." Tous ces travaux de recherche et d'analyse, brillamment orchestrés par les journalistes de l'émission, ne se font pas au détriment de cette émotion, que le spectateur s'apprête à ressentir lorsqu'il opte pour un tel programme. Ainsi, la simple mise en scène de l'émission, particulièrement inventive, suffit à le plonger en plein "polar", et ce dès les premiers soubresauts de l'enquête judiciaire. Et puis, la salle d'interrogatoire de Sir Hondelatte emprunte beaucoup aux commissariats. Un élément particulier du décor frappe évidemment les esprits : ses murs, couverts de coupures de presse, qui illustrent l'affaire dont il est question. Jeux d'ombres et effets sonores à l'appui, les virées nocturnes du présentateur contribuent à maintenir cette atmosphère oppressante : c'est à l'abri des regards (et presque au péril de sa vie, pourrait-on croire), sur les rives d'un cours d'eau ou à proximité d'un terrain vague, que le vaillant Christophe Hondelatte part à la rencontre de ses informateurs d'un soir.

L'assassinat du juge Michel, la disparition du petit Grégory, Guy Georges (le tueur de l'Est parisien), Sid Ahmed Rezala (le tueur des trains), Patrick Henry (le procès de la guillotine), Emile Louis (le mystère des disparus de l'Yonne). Ici, peu de place au racolage et aux redites. Les sujets traités ne sont jamais les plus simples. Les réponses ne sont jamais les plus évidentes. Faites entrer l'accusé offre un regard nouveau sur certains de ces dossiers brûlants, qui ont à la fois marqué les mentalités et les comportements. Chaque numéro est l'occasion d'entrevoir et de comprendre la succession des événements ayant conduit à l'ouverture d'une enquête judiciaire pour chacune de ces affaires. Mais j'ai l'intime conviction que ce magazine d'information favorise également le développement de l'esprit critique de tout un chacun.