1/10Top Model 2005

/ Critique - écrit par iscarioth, le 14/07/2005
Notre verdict : 1/10 - Téléréalité, télécoaching et télécélébrité... (Fiche technique)

Tags : model france amour alizee models emission beaute

Téléréalité, télécoaching et télécélébrité...

L'été a toujours une saveur télévisuelle particulière. Les chaînes tentent souvent des expériences plus osées qu'entre septembre et juin. Les émissions de Real TV fleurissent, avec souvent de l'érotisme et de l'exotisme (Opération Séduction, Koh Lanta, l'île de la tentation...). M6 a, durant l'année, beaucoup misé sur le télécoaching, avec des émissions comme Super Nanny, Panique en cuisine ou encore Il faut que ça change. Pour cet été, la chaîne la plus en progrès du PAF (du moins en terme d'audience) nous a préparé un cocktail audiovisuel réunissant trois des pires aspects de la télévision d'aujourd'hui : la téléréalité, le télécoaching et l'apologie de la notoriété médiatique.

Principe de l'émission

Après un long casting, douze jeunes filles ont finalement été retenues pour l'émission Top Model 2005. Celles-ci vont être entraînées au métier de top model : séances photo, sport, alimentation, stylisme, défilés, relooking... A la clé, un contrat avec une célèbre agence de mannequin. Chaque semaine, l'une des candidates est éliminée.

Un camp de beauté

Les reproches que l'on peut faire à Top Model 2005 sont certainement ceux que l'on peut faire au milieu de la mode en général. Les jeunes femmes sont véritablement objectisées, on les traite comme du bétail : on palpe, on manipule, on mesure, on scrute dents et doigts de pieds... Des gestes qui rappellent ceux d'un négrier contrôlant la qualité de sa « marchandise ». Les douze jeunes filles retenues pour l'émission se voient reformatées de la tête au pieds : on choisit pour elles leur nouvelle coupe de cheveux, leurs nouvelles habitudes de vie. On met au régime des filles déjà dangereusement filiformes. Les douze jeunes filles n'ont, à aucun moment, leur mot à dire sur les choix faits à propos de leur personne par les quatre experts du jury. On assiste à une véritable dépersonnalisation, à un grand reformatage amorphe. Les douze jeunes filles sont des objets sur lesquels on travaille. Le comble du ridicule est atteint lorsque les quatre experts s'affairent autour d'une jeune fille muette en déclarant vouloir lui attribuer une personnalité esthétique.

Regarde les gens pleurer...

Emission de coaching oblige, on assiste à de remarquables séances d'humiliation. Des humiliations doublement publiques, car portées devant les onze autres jeunes filles, mais aussi sous l'oeil carnassier des téléspectateurs. Le jury dédaigne parfois très agressivement le physique de certaines candidates et s'emporte avec mépris à propos de considérations esthétiques qui semblent pour le commun des mortels absolument superflues. Evidemment, comme dans toutes les émissions de Real TV, les caméras traquent la moindre larme, le moindre regard, le moindre geste pour ensuite nous restituer au montage un condensé d'images complètement romancées. On ne loupe aucune engueulade, les caméramen poursuivent partout nos belles jeunes filles en pleurs... Les caméras de M6, déjà surentraînées à l'exercice depuis plusieurs années, recueillent les paroles de filles qui médisent les unes sur les autres. Les jeunes filles sont logées dans un même appartement parisien pour exacerber les tensions. Soyez les bienvenues dans un monde où les notions d'intimité, de discrétion et de respect n'existent pas...

Ne quittez pas, on vous prend au sérieux

Forcément, le montage de l'émission est très à la mode, avec une bande son qui varie beaucoup selon les situations, reprenant souvent les hits de l'année. Comble du ridicule, on va jusqu'à placer la bande originale de Requiem for a Dream dans les moments décisionnels, éliminatoires, d'angoisse... Images et scènes s'enchaînent avec une multitude d'effets de style bien répandus : flashs, ralentis, images teintées, images multiples, fondus... Tout est fait pour que le spectateur n'ait pas le temps de penser à sa télécommande. A de nombreux moments, on répète ce qui a déjà été dit mille fois dans l'émission précédente, à savoir que les membres du jury ne sont pas n'importe qui. Les quatre lurons sont présentés comme des professionnels infaillibles, des rois du bon goût. On rappelle leur carrière et leurs activités à chaque émission par une ellipse.

Modèles et buts

Top Model 2005 véhicule des idées assez dangereuses. Tout d'abord, et c'est très apparent, l'émission impose avec violence (humiliations, contrôles) un standard de beauté au public, dont certaines franges sont à ce niveau influençables. Top Model 2005 impose aussi une idée très dérangeante selon laquelle le fait d'être inconnu rime avec médiocrité. La notion de célébrité est vue comme synonyme de valeur. Passez à la télé et vous existerez. Une idée véhiculée par l'émission qui fait un bon mariage avec l'un de ses principes fonctionnels : la logique du concours. A l'arrivée de Top Model 2005, il y aura peut-être trois filles aptes à exercer le métier de top model... Mais peu importe. Le but n'est pas d'arriver à un niveau mais de retenir une seule fille comme le symbole de l'élite et de la réussite.

Il n'y a aucun intérêt à suivre l'émission Top Model 2005, si ce n'est d'être absorbé par l'habituel phénomène Real TV : on s'attache à des personnages typés, on s'identifie et on veut suivre leurs évolutions et connaître leur devenir.
Top Model 2005 est diffusé en prime time sur M6 tous les mardis soir et ne connaît pour l'instant pas un succès retentissant. L'émission dépasse à peine les 10% de part d'audience. Si M6 utilise les mêmes armes que son homologue américain UPN qui a lancé avec beaucoup de succès America's next top model il y deux ans, il se pourrait que, pour faire grimper l'audience, la chaîne joue rapidement la carte du sulfureux. Une séance photo érotique est déjà prévue pour la prochaine émission...