6.5/10GQ - Gentlemen's Quarterly

/ Critique - écrit par JC, le 17/03/2008
Notre verdict : 6.5/10 - Grande Qualité gâchée par la pub (Fiche technique)

Tags : magazine gentlemen quarterly prix eur nouvelle livraison

Contrairement à ses concurrents, GQ ne prend pas son lecteur pour un éternel ado. Et c'est déjà beaucoup. On regrettera simplement une pub omniprésente.

Masculin, beau et intelligent. Voilà la promesse de GQ, le dernier mensuel pour hommes apparu dans les kiosques français. Un slogan un brin prétentieux qui rappelle la liste de courses sentimentales des femmes en quête de l'homme idéal. On se demande alors pourquoi la phrase ne s'est pas étirée avec « drôle, sportif, ambitieux, gentil et qui offre des cadeaux tout le temps comme dans les films ». Mais les trois adjectifs de départ apparaissent déjà comme un vrai défi dans un pays où la presse qualifiée de masculine se résume à nichons et abdos.

Le numéro du cinquantenaire
Le numéro du cinquantenaire
La déclinaison française de GQ était donc particulièrement attendue au tournant. Référence parmi les références, Gentlemen's Quarterly (« le trimestriel des gentlemans ») donne le « la » du savoir-être masculin depuis 1957 aux Etats-Unis. Une bible du bon goût vénérée par les dandys du monde entier.

Alors commence la dissection et les entrailles choquent. Le kiosquier s'est manifestement moqué de nous et nous a refilé un catalogue de VPC pour patron du CAC40. Le lecteur doit explorer 30 pages de publicités avant de déboucher sur le sommaire, lire quelques articles de présentation bienvenus puis repartir encore jusqu'à la page 77 pour débuter réellement. Sans renier le travail artistique de certaines agences de publicité, le volume de réclames présent dans GQ parasite sa lecture. Un vrai problème qui en rebutera plus d'un prompt à maudire le versant capitaliste du monde. Cependant la surprise est au rendez-vous.

Car le contenu de GQ tient ses promesses. Le magazine se découpe en 18 rubriques. Certaines se révèlent traditionnelles comme Buzz (culture), Plaisirs (loisirs) et Futurs (hi-tech, architecture, design, automobile). D'autres en revanche font montre d'originalité. Le « Salon » de GQ regroupe les réflexions de diverses plumes célèbres (Nicolas Rey, David Abiker, Camille de Peretti, etc.) autour de phénomènes de société. Du dimanche DVD à la traduction des titres de films américains en passant par le jugement des femmes sur les hommes, GQ livre ses pensées à coup d'anecdotes souvent bien senties pour un vrai plaisir littéraire. Autre délectation du côté de la rubrique « Globe ». Le numéro critiqué dévoilait un reportage baptisé Talibans, la garde approchée. Un article d'investigation rigoureux de qualité qu'on croirait issu du Time.

A cela s'ajoute d'autres moments forts comme le portrait de
Vincent Cassel par Laurent Rigoulet suivi d'un retour sur la carrière de Jacques Mesrine par le journaliste Denis Robert. Ou encore une interview déconcertante de naturel entre Frédéric Beigbeder et François Bayrou.

GQ étant une histoire de style, la rubrique consacrée à la thématique occupe une large place dans ses pages. Premier numéro oblige, le magazine s'attarde sur les fondamentaux de l'élégance masculine. Beaucoup apprendront qu'ils ne possèdent aucune classe. Ca peut faire mal mais le ton léger des conseils énoncés fait passer agréablement la pilule. Equivalent masculin de Elle, GQ n'échappe pas aux séries de photos entre art et shopping avec des panoplies qui valent deux smics. Dommage pour le lecteur lambda. On se refera avec l'histoire alambiquée de la marque Fred Perry ou un récapitulatif de 100 ans de fragrance masculine.

Un exemple de numéro du GQ américain
Un exemple de couverture US
Il y a quand même du sport et des meufs dans GQ mais pas d'articles sur « comment avoir des abdos en béton pour l'été » ou « les plaisirs secrets de Paloma ». Pour le sport, le magazine revient sur le duel légendaire qui a opposé Johan Cruyff et Franz Beckenbauer lors de la finale du Mondial 1974. En matière de filles, GQ en parle pas mal sans pour autant décocher des astuces en matière de drague. Un article préfère livrer les « 10 commandements du parfait Ecolover ». Une perspective amusante où l'on rencontre des préceptes tels que « A l'arrière d'une Prius, tu le feras » ou « Avant de l'embrasser, la lumière tu éteindras ». Ce qui n'empêche pas d'apprécier des jambes (Katherine Heigl en page 77), des seins ainsi que des fesses. Mais ces deux derniers ne s'affichent pas avec la complaisance d'une héroïne de télé-réalité dans New Look. Le portfolio s'intéresse au travail du photographe Jeanloup Sieff mis en lumière par Jean-Jacques Naudet, ancien rédacteur en chef du magazine Photo.

GQ pèche en revanche dans ses sujets tendances qui ont un air de déjà vu en 2008 comme les fameux coups du retour de la moustache, du street golf et des soirées afterwork.

Indubitablement classe bien qu'un tantinet conformiste, GQ tient néanmoins ses promesses. La maquette est agéable et le contenu possède effectivement « l'autre ton » promis en une. Contrairement à ses concurrents, il a également l'avantage de ne pas prendre son lecteur pour un éternel ado. Et c'est déjà beaucoup. Toujours est-il qu'avec l'hyper présence de la publicité, GQ se découvre avec un très mauvais a priori. Or les hommes de goût savent que la première impression est fondamentale, quoique parfois trompeuse.

Nb : la critique de GQ a été réalisée sur le premier numéro de son édition française. Proposé au prix de 1 euro au lieu de 3,40 euros, il a en grande partie été financé par la publicité. D'où son volume important. On peut logiquement s'attendre à une réduction des pages de réclame dans les prochains numéros du mensuel. Enfin, on croise les doigts.