Interview de Fantöm et Gaea de Noob

/ Interview - écrit par Guillom, le 13/12/2012

Tags : noob guilde fabien niveau fournier saison artheon

« Ce que les gens nous amènent, ce n'est pas sans conséquences »

Les webséries sont aujourd'hui un élément incontournable de la culture geek, mais pas seulement. Fabien Fournier, alias Fantöm, créateur, réalisateur, scénariste et même acteur de la websérie culte Noob et Anne-Laure Jarnet, alias Gaea, coscénariste et actrice, ont répondu à nos questions.

Pourquoi réaliser une websérie ?

Fabien Fournier : On a commencé en 2000 à faire du film amateur et pendant 8 ans on a plutôt opté pour du format 20 minutes. On a même poussé jusqu'à 50 minutes pour un film. Puis il y a eu le développement des shortcom à la télé comme Kaamelot, Un gars, une fille à une époque où, nous, on commençait à entrer dans la vie professionnelle, à faire des études supérieures, ce qui a fait en sorte qu'on pouvait moins se permettre de faire du format très long. Donc on a transposé ça sur Internet pour des raisons pratiques et on a proposé un format plus court et plus fréquent, sans savoir qu'aux Etats-Unis, c'était en train d'exploser.

Anne-Laure Jarnet : Il faut aussi savoir que parce qu'on est amateur, on avait la volonté de ne pas saouler le public pendant trop longtemps. On faisait déjà des petites séries comme ça, entre nous, sur des formats assez courts, pour essayer de faire en sorte que les gens continuent de regarder et ne soient pas lassés. Donc le format court est adapté et pour Noob, notre série phare, on est partis sur un temps assez réduit, avec un format également adapté à la diffusion sur la chaîne Nolife aussi.

Fabien : C'est ça, c'est vraiment le compromis idéal, vu que nous ne sommes pas assez bons pour tenir une intrigue trop longue. Du coup, en 6 minutes, le public n'a pas vraiment eu le temps d'être terrassé par notre mauvais jeu d'acteur et ça nous permettait de proposer un contenu beaucoup plus fréquent que si on proposait quelque chose de long. Parce que le but du jeu, ce n'est pas de s'enfermer dans une cave pendant deux mois, faire de la post-production, sortir un vidéo et ne plus exister pendant deux mois.

Anne-Laure : Il faut savoir que la websérie est un outil qui est vraiment intéressant pour nous parce que ça permet d'abord avoir la possibilité de développer un univers sur du long terme et de développer certains personnages qu'on n'aurait pas pu enrichir si on avait fait juste un film. Ça permet vraiment d'avoir le temps de poser son univers. Il y a aussi une espèce de fidélité vis-à-vis du public qui se crée au fil du temps, un public qui suit les épisodes au fur et à mesure, qui découvre pas à pas l'univers... C'est vraiment un format qu'on aime beaucoup.

Quelle est l'idée qui a présidée à la création de Noob ?

Fabien : D'abord l'humour. On nous le pardonne plus facilement. Quand on n'est pas acteur professionnel, les gens vont être plus indulgents si on fait de l'humour. Nous ne sommes pas des acteurs et si jamais on essaie de faire pleurer les gens, ça fait vite série Z polonaise pour le coup.

Anne-Laure : On a déjà essayé, on a déjà fait des films amateurs. Du sérieux, de l'épique...

Fabien : On ne s'interdit pas d'essayer de temps en temps, mais on sait que c'est kitsch. Final Quest, c'est encore plus vieux que ça, entre 2000 et 2002. C'est là que tout a commencé. C'est de la parodie de mangas et de jeux vidéo. Il y a Link, Poppu de Dragon Quest et Great Saiyaman de Dragon Ball Z. Ce sont des antihéros qui essayent de sauver le monde mais qui sont largement parodiés. On n'avait pas notre univers à nous à cette époque là.

Anne Laure : Il faut savoir que ces films étaient diffusés dans le cadre des conventions de Jap Animations, type Japan expo ou Toulouse Game Show. Donc le public qui regardait ces vidéos, c'était des fans de jeux vidéo et de mangas. Les conventions rendaient ça possible. Nous, on le faisait parce que ça nous faisait marrer et que ça faisait partie de notre univers geek.

Aujourd'hui, Noob est un succès énorme en terme de vues sur Internet. Est-ce une surprise ou vous attendiez vous à la réussite de ce projet ?

Fabien : Ce qu'il faut savoir, c'est que de 2000 à 2008, on faisait des films amateurs régulièrement et on connaissait quasiment tous nos fans... c'est-à-dire 30-40 personnes sur le forum. A la base, ce n'était vraiment pas fait pour générer de la communauté et des fans.

Anne-Laure : Aussi nous exerçons tous des professions qui n'ont rien à voir. Fabien a commencé par le droit, moi aussi je fais du droit et j'y suis toujours. On a tous des métiers à côté, c'est vraiment une passion.

Fabien : Le fait d'avoir été diffusé sur Nolife a beaucoup joué, en fait on s'attendait à avoir effectivement plus de visibilité, puisque c'est une chaîne télé. On a vu Nerdz, on a vu la Flander's Company... Après la question est : est-ce qu'on aurait justement été à la hauteur d'avoir une communauté comme eux ? On a eu de la chance d'avoir un public alors qu'on ne s'y attendait pas trop, mais on s'est servi de ce succès pour avoir une énergie qui nous permettait de faire du contenu plus régulier. C'est-à-dire qu'il y a une attente telle que je vais peut-être bosser toute une nuit pour pouvoir livrer l'épisode à temps parce qu'on sait qu'il y a la communauté derrière et qu'elle va apprécier alors qu'aujourd'hui encore on n'est pas payés par la websérie.

Anne-Laure : On savait par contre que le thème était intéressant. On savait que les MMORPG (ndlr : Jeu de rôle massivement multijoueur) était un sujet qui était un peu occulté par les médias.

Fabien : On est arrivé au bon moment, il y a toujours eu un facteur chance en fait. Pour Noob, je crois qu'on arrive aux 40 millions de vues tous épisodes confondus, c'est un chiffre qu'on n'aurait pas pu imaginer, même dans nos rêves les plus fous. En fait ce qui est vraiment intéressant c'est que certaines personnes pensent qu'on continue parce qu'on surfe sur le succès. Mais ces gens ne savent pas que pendant 8 ans, personne ne regardait nos épisodes. Si ce n'était pas de la passion, on aurait arrêté depuis longtemps. En plus, le média vidéo est le seul sur lequel on ne gagne pas d'argent. Maintenant, autant de vues, c'est vraiment une énergie qui nous pousse à essayer de publier du contenu plus régulièrement afin que les gens qui nous font confiance ne soient pas déçus.

Anne-Laure : il faut dire que c'est grâce à ça qu'on a pu faire tout le reste. C'est grâce à ça qu'aujourd'hui Fabien est auteur de bande dessinée, de roman.

Qu'entendez-vous par « le bon moment » ?

Fabien : En 2002, quand on a commencé à faire un truc sur le MMORPG (ndlr : Level Level), c'était purement un hasard. A la base je voulais mélanger les genres et je me suis dit que le jeu vidéo était un bon prétexte. Je suis fan de RPG (ndlr : Jeu de rôle) donc Zelda, Secret of Mana, Final Fantasy VII c'est mon panthéon ultime. Mais faire une série dans un MMO, avec des PNJ,et des factions stéréotypés, c'est un peu limité. Donc on a donc donné une dimension online avec plusieurs personnes humaines qui devaient avoir des réactions beaucoup moins rigides.

A cette époque, il n'y avait que quelques MMORPG, Everquest et Phantasy Star pour les premiers, World of Warcraft n'était pas encore sorti. Lorsque WoW est arrivé en 2005 en Europe, nous sommes devenus des joueurs de MMO, c'est pour ça qu'on a créé un reboot de Lost Level et on a vraiment été les premiers à faire une série live sur le thème du MMORPG. En fait, on a été les premiers à présenter du contenu d'un jeu vidéo avec les codes d'un MMORPG, avec des curseurs, des points de vie, des trucs et des machins et je pense que le public s'est dit « voilà quelque chose que je ne vois pas à la télé, que je ne vois pas en dessin animé, que je vois en série live, fait par une bande de potes qui déconnent ». En plus comme nous sommes de vrais joueurs de MMO, ce sont de vraies anecdotes qu'on raconte et souvent les gens disent « Ah ouais, dans Noob, c'est trop ça », « ce type de personnage-là j'en connais un », « Ah, cette anecdote là sur le donjon de Bidule »... Petit à petit, une part de fiction s'est installée : les personnages ont improvisé, ils ont pris le pouvoir dans la licence. il y a deux catégories de personnes qui regardent Noob, ceux qui veulent voir des anecdotes pour se remémorer des faits de jeu et des délires entre potes, et ceux qui sont intéressés par ce qui peut bien arriver aux personnages. Voilà, je pense qu'il y a beaucoup de facteurs qui font qu'on a eu X vues, parce que beaucoup de gens y ont vu quelque chose de novateur, au même titre que Naheulbeuk a révolutionné le genre du jeu de rôle avec sa parodie audio. On a eu cette chance d'être précurseur dans un domaine.

Assez parlé du passé, quels sont vos projets ? Comment Olydri studio va-t-il évoluer ?

Fabien : Nous allons commencer à tourner la saison 5 de Noob en Décembre, mais je vous ai concocté une petite surprise. Un peu une scène d'ouverture qui va laisser beaucoup de questions en suspens, concernant notamment Arthéon et Sparadrap. Mais je n'en dis pas plus. Pour les projets, on va commencer par un truc tout récent, qui est un petit spin off. Je laisse Anne-Laure parler de son petit blog.

Anne-Laure : Alors, dans l'univers de Noob, le personnage de Gaea a un petit blog, LeBlogDeGaea.com, sur lequel elle met toutes les vidéos compromettantes sur ses collègues et adore y ridiculiser Omega Zell. On est parti de ce concept pour le décliner en un véritable blog, en lui donnant vie. On hésitait quant à la forme et en regardant ce qui se faisait sur Internet au niveau des blogs, on est tombé sur les podcasts de Norman, de Cyprien, etc. On s'est dit que ce format là pourrait être bien : nous n'avions encore jamais touché au format sketch pur et dur. On veut donner vie à notre univers et, en même temps, faire plaisir aux fans, leur rappeler de bons souvenirs de la série.

En même temps c'est vraiment donner vie au personnage parce que dans le blog de Gaea, Ce n'est pas Anne-Laure Jarnet qui parle, c'est Gaea, Gabrielle Jolivet IRL (ndlr : In Real Life : terme désignant la réalité). Fabien et moi, on écrit les sketchs, c'est vraiment un projet qu'on voulait faire un peu que tous les deux. Noob brasse une centaine de personnes aujourd'hui et on s'est dit que nous n'avions aucun projet où tout ne dépend que de nous deux.

Fabien : Ensuite, toujours dans la logique crossmedia, il y a la bande dessinée Noob. Cette année, on va sortir le tome 8. C'est quasiment le départ de la BD, puisque Fantöm entre dans la guilde Noob. C'est un passage qui est passé sous silence dans la websérie parce que je suis réalisateur et que je ne peux pas être à la fois acteur et réalisateur. Dans la BD, j'avais prévu d'expliquer tout ce qui allait se passer. Le tome 8 marque un peu le départ de l'émancipation de la BD par rapport à la websérie. Ça va être des dizaines et des dizaines de tomes, une série dans la série. Dans Noob [la websérie] on voit Fantôme débarquer dans la guilde au niveau 1 pour en sortir lorsqu'il atteint le niveau 100 : ce qui se produit entre ces deux évènements, on ne l'a pas vu. La BD va donc être l'occasion de raconter cette histoire.

Anne Laure : L'intérêt, c'est bien sûr d'avoir des médias indépendants les uns des autres afin qu'on puisse suivre la série sans avoir à lire le roman ou la BD. De même on peut tout à fait lire la BD et comprendre ce qui se passe dans l'aventure sans avoir besoin des autres médias.

Fabien : Chaque média est indépendant et complémentaire. La BD peut être lue complètement sans connaître ni le roman, ni la websérie. Fatalement, il y a quelques scènes qui sont obligatoirement reprises, des évènements qui doivent être dans chaque média mais souvent présentés différemment, c'est-à-dire un même fait vu par des personnages qu'on n'avait pas vus à ce moment-là dans la websérie. C'est très lourd comme travail, il faut vérifier à chaque fois que les histoires collent avec ce qu'on a dit, ce que les personnages font sur les autres supports. Sinon le roman 4.5 de Noob est sorti récemment, sachant que le premier cycle sera composé de cinq romans, après on passera sur Noob Reroll, le deuxième cycle. Et puis il y a le jeu video Noob dont le premier chapitre La légende du Comte de Parröw sortira fin 2013 sur PC. Ça avance petit à petit, l'équipe développement travaille dessus. A côté de ça, on a notre nouvelle série, Warpzone Project, avec une première saison de dix épisodes. Ce sont des saisons moins longues, quitte à en faire deux par an car elle reste une websérie secondaire à côté de Noob. Mais on avait envie d'essayer autre chose, dans un environnement plus urbain. Pareil, c'est une licence crossmédia.

Crossmedia ? C'est-à-dire ?

Fabien : Disons que je suis vraiment un auteur crossmedia, je ne veux pas me lasser, me dire « allez ! épisode 75, clic clic », du pareil au même. Alors je fais du roman, de la BD, parce que j'ai grandi avec le crossmedia et en tant qu'auteur, j'ai besoin de m'exprimer par ce biais là. Par exemple dans la websérie Noob, je ne vais pas pouvoir faire de dragons ou une armée en armure d'or, donc je le fais soit dans la BD soit dans le roman. Ça me permet vraiment de n'avoir aucune limite : je peux produire mon univers là où je le veux, chaque média ayant ses propres atouts. Ça me permet d'être un auteur heureux.

De façon plus générale, pourquoi les webséries suscitent-elles autant d'intérêt ?

Anne Laure : Je pense que, quand les Guignols disent « vous regardez l'ancêtre d'Internet » en parlant de la télévision, c'est un peu juste. Maintenant, la jeune génération, celle qui a grandi avec Internet, n'a plus du tout les barrières qui existaient avant. Il y a un désintérêt et un désaveu de la télévision et de la programmation des chaînes. Il y a une volonté de faire à la carte et aujourd'hui, les gens savent très bien que sur Internet, tout est disponible, qu'ils ont accès à tout. Donc les webséries, les podcasts sont vraiment en phase avec l'époque, avec ce qu'on vit.

Fabien : On va faire un peu de sociologie. Pour moi, les habitudes ont changé : quand on allume la télé, si on ne trouve pas ce qu'on veut de suite, on zappe un peu, on l'éteint et on va chercher ce qu'on veut sur Internet. Autre chose, les gens qui décident à la télévision aujourd'hui n'ont pas réussi la « transition geek » : c'est une génération qui est vieillissante et il existe une fracture entre ceux qui étaient là avant Internet et ceux qui ont grandi avec. Ils n'ont pas su choisir les programmes qui vont intéresser les nouveaux venus, du coup il n'y a pas de renouvellement. Par exemple, alors que le MMORPG est un succès avec des millions de joueurs dans le monde, un truc si énorme que toute personne à la télé devrait s'être dit qu'il faut traiter le sujet de façon pertinente, faire un dessin-animé là-dessus, et cætera. Mais ils ne l'ont pas fait. Alors les gens vont chercher sur Internet un contenu qu'il ne trouve pas à la télévision : Visiteur du Futur, Flander's Company et ainsi de suite. Je pense qu'il y a un contenu qui, à la base, est fait par des gens qui, comme nous, ne voyaient pas ces choses là à la télé et se sont dits « Nous, on va le faire ». On s'adresse à une génération qui est lassée de trouver toujours les mêmes contenus. Et quand un truc geek sort à la télévision, toute cette génération laisse tomber « Oh je préfère rester chez moi pour jouer à World of Warcraft ! Je suis un geek et je n'ai pas de vie sociale ». Le vrai geek, entre guillemets, il ne peut pas s'en satisfaire de ça.

Anne Laure : Le discours est toujours le même dans les médias classiques, le pire est dans le journal télévisé. Il y a toujours, malgré tout, malgré le nombre de personnes qui jouent aux jeux vidéos, toujours des phrases stigmatisantes.

Fabien : Je pense qu'il y a de jeunes cinéastes qui maintenant sont plus proches de leur communauté grâce à Internet, la télévision étant coupée d'une certaine demande. Ces jeunes cinéastes ont réussi à comprendre avant la télévision ce qu'aimerait voir la jeune génération. Et dernier point, je pense le plus important, les webséries s'adressent à des communautés, alors que les chaînes télés s'adressent au maximum de monde possible. Alors aujourd'hui ça commence à changer avec la TNT mais ça reste monolithique. Prenons Les Geeks, né websérie, maintenant diffusé sur NRJ12 : il y a certains gags qui tapent tout à fait justes, mais d'autres pour lesquels on se dit que c'est trop léger, qu'un « geek » ne se comporte pas comme ça. Pourtant ça marche. Il y a une vision pour la TV et une vision pour Internet. Ce sont deux sphères qui n'ont pas vocation à se concurrencer directement sur certains contenus.

Et vous, vous accepteriez d'être diffusé à la télévision ?

Fabien : Nous, on est une bande de potes à la base, donc nous sommes un peu particuliers. On a conscience qu'on n'a pas un niveau de jeu d'acteur qui est suffisant pour passer à la télévision contrairement à l'équipe de Visiteur du futur, qui sont de véritables comédiens. Ils ont un niveau qui permet que leur série soit diffusée à la télé. Dans Noob, même si un acteur n'est pas bon, on tourne avec, c'est notre cour de récré. Si demain on nous propose un projet, je suis prêt à discuter, on peut faire des compromis. Après, si à force de compromis l'idée devient un truc tellement lisse qu'on tombe dans l'humour de base, genre « le geek c'est l'intello de base avec plein de boutons et des lunettes », c'est non, ça ne m'intéresse pas.

Faire un truc plus grand public, pourquoi pas, on peut essayer mais ça ne sera ni Noob, ni Warpzone Project. On avait proposé Online, une série de courts gags sur les jeux en ligne, des sketchs indépendants, qui ne seront pas feuilletonnant. On n'a pas abandonné l'idée, c'est un truc qu'on devrait faire. La même question se pose : est-ce que ça peut avoir vocation à être diffusé sur une chaîne de télé ? sincèrement, je ne sais pas. Je suis ouvert à toute discussion mais je ne suis pas prêt à abandonner un certain niveau d'exigence en termes de libertés.

Anne-Laure : Mais peut-être que l'objectif ultime, ce n'est pas la télévision. Justement peut-être que la télévision n'a plus rien à nous apporter de particulier. Ce n'est plus forcément un graal.

Fabien : Justement, puisqu'on parle de générations et de médias, on a lu l'article dans Le Point... on était sidérés. Ça marque vraiment une fracture générationnelle, un clivage. Elle [l'auteure] est tombé dans tous les clichés : Breivik, Merah étaient des tueurs parce qu'ils jouaient à des jeux vidéo. Après c'est vrai, il y a un syndrome d'addiction mais c'est comme toutes les passions. Il y a des cas isolés, mais c'est comme partout. Nous on essaie de dédiaboliser ça. Quand des parents viennent nous voir et qu'ils nous disent que grâce à la série, à la BD, ils comprennent ce que leurs enfants font devant leur ordinateur, le système de personnages de quêtes. Ça nous touche vraiment.

Ce qui est une très bonne transition pour notre question suivante : pourquoi participer à des conventions ? Qu'est-ce que ça vous apporte ?

Anne-Laure : c'est le moment où pour nous, acteurs, notre investissement est au max parce que les gens sont là, qui veulent nous voir, qui demandent des dédicaces. On pourrait jouer les stars, avec des dédicaces de telle heure à telle heure et après plus personne, mais on a vraiment cette envie de voir les gens.

Fabien : Bonne ambiance, on rencontre des gens passionnés, on tisse des liens. Par exemple, Brigitte Lecordier, la voix de San Gohan et Eric Legrand, la voix de Vegeta, vont jouer dans la saison 5 de Noob : on les a rencontrés sur des conventions.

Anne-Laure : On ne le prend pas comme un job, c'est l'occasion de discuter, de voir des gens passionnés mais il n'y a pas que ça. On est tous calibrés de la même façon dans l'équipe, on a tous conscience que demain, un jour, ça s'arrêtera et on ne veut pas se dire « si on avait su, on aurait plus profité ». On profite à fond, on voyage, on rencontre des gens. Et ce que les gens nous amènent, ce n'est pas sans conséquences. Ils donnent une énergie folle. Et surtout on aurait pu croire qu'on a un public cible, des garçons à 80%, entre 10 et 30 ans mais en fait c'est des gens de tous âges, des parents qui viennent nous voir et qui nous disent qu'ils regardent Noob en famille.

Fabien : A chaque fois, on a besoin de le voir pour le croire, que des gens puissent faire une heure de queue pour avoir une dédicace ou une photo avec nous, parce qu'on se voit encore comme une bande de potes, c'est disproportionné. A chaque fois on a l'impression de vivre un truc hors du commun, ça nous donne envie d'y retourner car c'est grisant, c'est valorisant. J'espère que nos réponses n'étaient pas trop brouillonnes. Elles sont faites avec les neurones d'un festival, c'est-à-dire peu de neurones, mais c'était vraiment avec plaisir.