Le monde de Joan
Séries & TV / Critique - écrit par weirdkorn, le 20/09/2005 (
Il est étonnant de voir à quel point les Américains sont portés sur la religion dans la vie de tous les jours. Des séries télévisées en ont évidemment fait leur principal sujet, comme la très puritaine 7 à la maison. Plus récemment, ce thème a été repris dans Le monde de Joan (Joan of Arcadia en VO) qui nous offre une version plus décontractée et décomplexée du rapport de chacun avec Dieu.
Joan vit dans une famille tout ce qu'il y a de plus normal. Son père, volontaire et intègre, est le chef de la police locale, sa mère, attentionnée et dévouée, travaille à son lycée, son petit frère est un génie des sciences et tout ce petit monde vit dans un joli pavillon de banlieue où la pelouse est tondue et les fleurs taillées. Mais il y a un hic. Son grand frère, autrefois le sportif populaire du lycée est désormais handicapé suite à un accident de voiture. Voilà l'équilibre de la famille légèrement chamboulé et les rapports de chacun ne sont plus ce qu'il étaient. La vie poursuit tout de même son cours jusqu'à ce que Dieu en personne apparaisse devant Joan pour lui demander d'exécuter certaines actions.
Cela sent l'énième série moralisatrice où Dieu le bienfaiteur tout-puissant dicte la conduite à tenir sous peine de se faire griller dans les flammes de l'enfer. En fait ce n'est pas du tout comme cela. Certes, Le monde de Joan donne des leçons de comportement à suivre mais pas dans le sens habituel où tout le monde est beau et gentil et où chaque individu n'est qu'un misérable insecte comparé au tout-puissant. Dans cette série, Dieu est mis au niveau de chaque individu, apparaissant sous une forme humaine à chaque fois différente et se comportant comme tel. Ici, pas de discours pompeux ou d'arrogance hautaine sur une prétendue supériorité, il parle d'égal à égal avec Joan sur un ton généralement détaché où il voit avec recul le monde tel qu'il est. De son côté, Joan est loin de faire des courbettes et ne se gêne pas non plus pour dire ce qu'elle pense de lui. Sans vouloir remettre en cause l'existence ou le bien-fondé de Dieu, la série propose une nouvelle manière de le percevoir. Elle essaie de mettre Dieu au même niveau que les humains et si cela permet de modifier certains comportements d'une Amérique puritaine, on ne peut que le saluer.
Il ne faut toutefois pas oublier que série s'adresse à la middle-class, celle des banlieues proprettes et dont les habitants vont à la messe chaque dimanche. Le monde de Joan transmet ainsi toute une série de bons sentiments entre la tolérance, la confiance en soi ou le jugement au-delà de l'apparence. Les deux amis de Joan, l'une garçon manqué et l'autre un peu spécial, en sont le meilleur exemple. Le but de Dieu est quand même d'apporter du bonheur et même si le plus à la fin de l'épisode apporté par Joan est infime, il n'empêche que c'est toujours un plus et que les gestes de Dieu permettent d'améliorer les choses.
Les histoires sont mises en scène d'une façon très classique et manquent la plupart du temps de rythme. C'est tellement vrai que l'on suit l'enquête du père en même temps que les actions de Joan pour mieux passer le temps. Sous le fil conducteur qui est l'acceptation pour le frère handicapé de sa nouvelle condition, la série propose à chaque épisode une nouvelle requête de Dieu (s'inscrire en cours de chimie, construire un bateau, ...), toutes bien différentes les unes des autres, permettant ainsi de ne pas voir de répétitions. Et si la série passe aussi bien, c'est avant tout grâce à des dialogues et à un jeu d'acteur tout à fait corrects.
Le monde de Joan risque de ne pas accrocher en France, les histoires étant trop orientées autour de la religion et du rapport à Dieu. On sent que la série vise avant tout à modifier les mentalités de la middle-class en traitant ce thème d'une façon originale. Après avoir parlé avec Dieu, il ne reste qu'une série banale racontant des histoires de la vie courante d'une façon réaliste et gentillette. Il est évident que si l'on veut voir une émission subversive on regardera ailleurs.